18 juillet 1944 Massacre de Signes : L’impossible oubli

22 Juil 2014 | Histoire, Libération de 1944

 

Reportage JC Honnorat en 2014

Cérémonie de commémoration des 18 juillet et 12 aout 1944 : 39 Résistants dont les principaux chefs du Var et des Basses-Alpes torturés et massacrés par les occupants allemands, un mois avant le débarquement allié qui libéra la Provence. Ce 18 juillet 2014, 70 ème commémoration. Présence de Richard Strambio Maire de Draguignan , accompagné de la famille de Jean Piquemal et de Madame Danièle Arnaud-Cisson, fille de Georges Cisson. Premier dépôt de gerbe du Cercle du Dragon, nouvelle association de mémoire et de maintien du patrimoine historique et républicain de Draguignan. Fondateurs François Volpi et Benoît Brunet Debaines, petit fils de Jean Piquemal, assassiné à Signes.

Article Wikipédia renforcé d’informations Canal-D:

Découverte du Charnier de Signes. L’existence du charnier a pu être connu par plusieurs sources :

• Les révélations que Ernest Quirot (Max Landry dans la Résistance), le seul rescapé de Signes, confie aux membres du Groupe Franc qui l’avait fait évader de l’hôpital Salvator le 10 août 1944, révélations qu’il confirmera dans sa déclaration à la police du 4 octobre de la même année, suite à la commission rogatoire délivrée par le juge d’instruction Bouquier du Tribunal de Marseille.

• Le témoignage du jeune bûcheron de Cuges-les-Pins, Maurice Percivalle qui se trouvait dans les parages du lieu du drame le 18 juillet 1944. Avant d’être chassé par un soldat allemand, il avait aperçu les résistants, certains grièvement blessés, creuser en chantant la Marseillaise la fosse destinée à les enterrer. Terrorisé par ce qu’il avait vu, il gardera d’abord le silence, puis aura, avec la Libération, le courage de parler et de mener les enquêteurs jusqu’à l’endroit exact du charnier.

• Les deux rapports secrets de la SIPO-SD de Marseille signés par Ernst Dunker (Dunker alias Delage) et retrouvés après la Libération : le rapport Catilina  du 7 juillet 1944 qui mentionne le nom d’un résistant exécuté à Signes et le rapport Antoine du 11 août 1944 qui en cite 24 autres. On apprend dans ces rapports que les arrestations des 25 résistants furent la conséquence de la trahison de Maurice Seignon de Possel-Deydier, alias Noël dans la Résistance, devenu l’agent Érick dans la Gestapo. Officier formé aux techniques du sabotage à Blida (Algérie), Maurice Seignon est parachuté en avril 1944 pour être instructeur dans les maquis en vue du débarquement en Provence. Pour des besoins d’argent, et peut-être aussi parce qu’il considérait que ses compétences n’avaient pas été reconnues, il propose à Ernst Dunker, alias Delage, le chef de la SIPO-SD de Marseille de lui donner contre trois millions de francs tous les renseignements nécessaires permettant de démanteler les maquis et les réseaux de résistants provençaux.

 

Maurice Seignon de Possel-Deydier, liquidé d’une rafale de pistolet-mitrailleur par ses “patrons” allemands le 8 août 44 à Marseille.

Reconnaissance des corps

Ce sont des prisonniers allemands regroupés au Camp du Coulin (Gémenos) qui furent contraints de déterrer les cadavres sous la surveillance des FFI. Les médecins légistes commis aux fin d’autopsie conclurent à un abominable carnage. Beaucoup de résistants avaient été abattus d’une balle dans la nuque et certains avaient été enterrés vivants car on retrouva de la terre dans leur estomac. La reconnaissance des corps fut rendue très difficile à cause de la chaux que les allemands avaient versée sur les visages des fusillés pour leur enlever toute identité7. D’ailleurs 4 d’entre eux sont toujours inconnus. Madame Georges Cisson, accompagnée du Docteur German , toubib de la résistance, reconnut le corps de son époux grâce aux chaussettes qu’elle lui avait elle-même tricotées. Son visage était méconnaissable à cause de la chaux vive dont les allemands l’avaient couvert. (Déclaration du Dr German à J.C.Honnorat)

 

Monsieur et Madame Angelin German. Toubib de la Résistance. Rescapé de la rafle de la gestapo ayant conduit au massacre de Signes.

Cérémonies

Des obsèques nationales eurent lieu le 21 septembre 1944 au cimetière Saint-Pierre en présence du commissaire régional Raymond Aubrac. Puis les corps furent remis à la disposition des familles qui désiraient les inhumer dans leur caveau familial.

Chaque année une cérémonie commémorative se déroule le 18 juillet au Charnier de Signes.

Liste des fusillés de Signes

Fusillés du 18 juillet

• Marcel André, 44 ans, Sigonce, directeur d’école, membre du Comité départemental de Libération (CDL) des Basses Alpes au titre de la CGT

• André Aune, « Berthier », « Marceau », 45 ans, Marseille, courtier, chef de l’Armée secrète (AS) des Bouches-du-Rhône

• Georges Barthélemy, 38 ans, Marseille, responsable AS et mouvement Libération

• Lucien Barthélemy, 41 ans, frère de Georges, Marseille

• Charles Boyer, « César », 60 ans, Marseille, ancien conseiller général radical-socialiste d’Aups, docteur en droit, négociant, membre du réseau La France au Combat

• Albert Chabanon, « Valmy », 29 ans, Marseille, professeur (école normale supérieure), responsable de l’Organisation Universitaire des Mouvements unis de la Résistance (MUR)

• Henri Chanay, « commandant Manuel », « Grand Michel », 31 ans, officier parachuté, chef de la mission interalliée

• Roger Chaudon, 20 ans, Oraison, directeur de coopérative, responsable local des parachutages

• Georges Cisson, « Dubosc », « Roumi », 34 ans, les Arcs, ingénieur des Ponts et Chaussées, chef régional Libération et NAP en R29, responsable de la publication du journal des Mouvements Unis de Résistance (MUR) de R2 (Provence Libre)

• Paul Codaccioni, « Kodak », 56 ans, Marseille, contrôleur principal des PTT, responsable du service des liaisons téléphoniques et télégraphiques de la résistance en R2

• François Cuzin, « Étienne », 30 ans, Toulon/Digne, professeur agrégé de philosophie (école normale supérieure), chef du service de renseignements des MUR des Basses-Alpes, membre du CDL

• Docteur André Daumas, 44 ans, Oraison

• Jean-Pierre Dubois, « Allain », 49 ans, Marseille, membre des MUR

• Docteur Léon Dulcy, 33 ans, Bras-d’Asse, membre du Special Operations Executive (SOE) britannique des Basses-Alpes

• Guy Fabre, « Berger », 20 ans, Marseille, étudiant

• Maurice Favier, « Élan », 27 ans, membre du CDL des Basses-Alpes

• Émile Latil, Sisteron, membre du CDL des Basses-Alpes

• Jean Lestrade, « Chac », 20 ans, Marseille, étudiant, agent de liaison de l’Organisation Universitaire10

• Maurice Levy, 32 ans, Nîmes, membre des services de renseignements américains

• René Mariani, « Gaillard », 23 ans, Marseille, étudiant, responsable adjoint de l’Organisation Universitaire

• Louis Martin-Bret, « Michel », 46 ans, Manosque, ancien conseiller général socialiste, directeur des silos et coopératives du département, chef des MUR des Basses-Alpes, président du CDL

• Jules Moulet, « Bernard », 45 ans, entrepreneur, chef NAP des Bouches-du-Rhône

• Jean Piquemal, « Jacqueline », 40 ans, Draguignan/Digne, infirmier, chef adjoint des MUR, membre du CDL des Basses Alpes

• Terce Rossi, 29 ans, Oraison

• Robert Rossi, « Levallois », 31 ans, capitaine de l’armée de l’air, chef régional des Forces Françaises de l’Intérieur (FFI) pour toute la R2

• Robert Salom, agent de liaison Francs-Tireurs et Partisans (FTP) des Basses-Alpes

• 3 inconnus.

Fusillés du 12 août 1944

• Paul Kohler, 44 ans, Marseille, chef mécanicien SNCF•

• Pierre Jean Lafforgue, « Philippe », 26 ans, Marseille, officier des services spéciaux de renseignements français

• Jean Libert, « Jourdan », 22 ans, Marseille

• Muthular d’Erecalde, major « Lucas », 34 ans, officier américain parachuté, membre de la mission interalliée

• Léon Pacaud, « Adrien », opérateur radio parachuté

• François Pelletier, lieutenant « Ruben », 24 ans, officier parachuté, responsable des liaisons par vedettes à Saint-Tropez

• Georges Saint-Martin, « Bourrely », 20 ans, Marseille, secrétaire du chef régional FFI

• André Wolf, 44 ans, Lançon, notaire

• 1 inconnu

Nécropole nationale

Le charnier de Signes est désormais une nécropole nationale dont le chemin est indiqué sur la route départementale 2 par un monolithe revêtu d’une plaque commémorative sur laquelle on peut lire « Aux héros et martyrs de la Résistance, tombés pour la libération dans ce vallon en juillet-août 1944 ». Sur le lieu du charnier, se trouvent les plaques nominatives en marbre des fusillés, une croix de Lorraine et un autel sur lequel est apposée une plaque indiquant que sous l’autel « un coffre renferme les ossements des fusillés ».

 

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